Revirement de jurisprudence – Annulation des prêts en francs suisses consentis par les Caisses de Crédit Mutuel

Sous l’influence du droit européen, les décisions récentes de la Cour de cassation rendues en matière de prêts en devises sont désormais favorables aux emprunteurs.

Par arrêt rendu le 7 septembre 2022, la Cour de cassation a cassé un arrêt d’appel qui avait retenu que les clauses de deux prêts in fine en francs suisses remboursables en francs suisses consentis par la Caisse de Crédit mutuel Mulhouse Europe étaient « claires et compréhensibles dès lors qu’elles précisaient, en des termes intelligibles, les modalités de l’amortissement de ces deux prêts avec conversion de la somme due en euros selon un taux de change, que les emprunteurs ont reçu une information au moyen d’un document signé le 1er février 2008 dans lequel la banque appelait leur attention sur les points particuliers de cette convention et notamment sur les risques d’évolution d’un capital placé sur un support spéculatif et les risques de change liés au cours du franc suisse, et qu’ils étaient en capacité d’apprécier la nature et la portée de leurs engagements et de mesurer les risques encourus en cas de dépréciation de l’euro par rapport au franc suisse ainsi que les conséquences induites sur leurs obligations financières ». 

La décision rendue par la Cour d’appel a été cassée par la Cour de cassation car les juges n’ont pas recherché si « la banque avait fourni aux emprunteurs des informations suffisantes et exactes leur permettant de comprendre le fonctionnement concret du mécanisme financier en cause et d’évaluer ainsi le risque des conséquences économiques négatives, potentiellement significatives, de telles clauses sur leurs obligations financières pendant toute la durée du contrat, dans l’hypothèse d’une dépréciation importante de la monnaie dans laquelle ils percevaient leurs revenus par rapport à la monnaie de compte, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision » (Civ. 1ère, 7 septembre 2022, pourvoi n° 21 15 199, à propos de prêts en francs suisses consentis par la Caisse de Crédit Mutuel de Mulhouse Europe).

Il résulte de cette décision que la Cour de renvoi devra statuer sur le caractère abusif des clauses des prêts du Crédit Mutuel au regard des critères d’exigence de transparence posés par la Cour de justice de l’Union européenne.

Cette décision suit une autre décision rendue le 30 mars 2022 par la Cour d’appel de Paris qui a également annulé des prêts en francs suisses consentis par la Caisse de Crédit Mutuel Région d’Altkirch en se fondant sur le droit des clauses abusives.

Elles s’inscrivent dans le cadre du revirement de jurisprudence opéré depuis mars 2022 par une série d’arrêts favorables aux emprunteurs.

En cas de nullité des prêts en francs suisses, l’emprunteur serait contraint de restituer uniquement la contrevaleur en euros des sommes empruntées, fixée au cours de change applicable à la date de conclusion des contrats et la banque devrait restituer en contrepartie les amortissements, les intérêts, les commissions et les primes d’assurance emprunteur perçues au titre des contrats depuis leurs dates d’effet. Une compensation s’opèrerait et toutes les sommes versées par l’emprunteur s’imputeraient sur sa dette en euros.

Au-delà du montant emprunté en euros, la banque devrait lui restituer le trop-perçu.

A titre d’exemple, en cas de nullité, l’économie réalisée serait supérieure à 150 000 euros pour un prêt de 400 000 francs suisses annulé dans la mesure où la perte de change serait annulée ainsi que les intérêts, les frais, etc.

Les prêts du Crédit Mutuel sont litigieux car ils contiennent des clauses inexactes et abusives qui n’informent pas correctement et suffisamment l’emprunteur du risque de change pouvant être subi en cas de vente du bien financé, dont le prix est en euros.

En cas de prêt in fine, adossé à un contrat d’assurance-vie en euros, le risque de change se réalise à la date de l’échéance finale, lorsque le capital en francs suisses doit être entièrement remboursé au moyen du rachat du placement en euros s’il est suffisant ou de la vente du bien financé en euros.

Le déséquilibre significatif est caractérisé par l’obligation mise à la charge de l’emprunteur de rembourser une somme excédant le capital initialement reçu.

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Prêts en francs suisses – Revirement de jurisprudence – La Cour de cassation juge imprescriptible les actions des emprunteurs de crédits en francs suisses fondées sur le droit des clauses abusives

Le contentieux des prêts en franc suisse regroupe plusieurs types de prêts : ceux remboursables exclusivement en euros et ceux remboursables en francs suisses et en euros.

Les prêts litigieux sont les suivants :

  • Les prêts en franc suisse souscrits auprès de banques françaises par les frontaliers suisses, ayant des revenus en francs suisses,
  • Les prêts souscrits par des emprunteurs démarchés par des conseillers en gestion de patrimoine ou par des banques  françaises afin de réaliser un investissement locatif, adossé à un mécanisme d’optimisation fiscale. En général, les emprunteurs n’avaient pas de revenus en francs suisses,
  • Les emprunts structurés souscrits auprès de banques françaises composés d’un prêt « in fine« , en francs suisses, non amortissable, adossé à un contrat d’assurance vie en unités de compte, composées d’obligations, d’actions et autres valeurs mobilières,
  • Les crédits multidevises souscrits auprès de banques étrangères, remboursables dans plusieurs devises,
  • Les contrats dits « Equity Release » composés de prêts en francs suisses ou mutlidevises souscrits auprès de banques généralement étrangères.

Ces prêts sont préjudiciables pour l’emprunteur car le cours EUR/CHF a évolué depuis plus de 15 ans, de 1,60 CHF environ pour 1 EUR en 2007 à quasiment la parité aujourd’hui, 1,03 CHF pour 1 EUR.

 Les effets de la chute de l’euro par rapport au franc suisse sont importants pour ces emprunteurs car leur dette d’emprunt a augmenté dans la même proportion que l’appréciation du franc suisse, à savoir de 60% dans l’exemple susvisé.

Le préjudice financier peut être très important, notamment pour les prêts in fine dont le capital n’est pas amorti pendant leur durée.

Pour les prêts amortissables, la contrevaleur en euros du capital restant dû représente parfois la contrevaleur en euros initiale du prêt, malgré plusieurs années de remboursement.

Parfois, il est plus important, de sorte que la vente du bien financé ne permet pas de rembourser le capital restant dû du prêt.

Les pertes financières provoquées par ces prêts en francs suisses sont donc parfois considérables et placent les emprunteurs dans des situations jugées souvent dramatiques.

De nombreux emprunteurs ont ainsi saisi les juridictions compétentes afin de faire valoir leurs droits car plusieurs moyens peuvent être soutenus. 

Par 5 arrêts rendus le 30 mars 2022, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en jugeant que : 

  • les actions intentées par les emprunteurs de prêts en francs suisses, remboursables en euros, fondées sur le droit des clauses abusives étaient imprescriptibles, de sorte que les emprunteurs sont recevables à agir, y compris plusieurs années après la conclusion des prêts ; 
  • si le banquier n’avait pas informé concrètement les emprunteurs du risque de perte de change, notamment par des simulations de variation du cours EUR/CHF,  la clause mettant la totalité de la perte de change à la charge de l’emprunteur pouvait être jugée abusive.

Si la clause relative à la perte de change est jugée abusive, le contrat de prêt en francs suisses peut ainsi être annulé.

Dans ce cas, l’emprunteur ne devrait restituer à la banque que la contrevaleur en euro reçue à la signature du prêt, déduction faite de l’ensemble des intérêts, amortissements, primes d’assurance versés par lui pendant sa durée.

La perte de change est ainsi annulée ainsi toutes les charges d’emprunt.

Ces décisions sont très favorables et devraient concerner l’ensemble des emprunteurs de prêts en franc suisse, notamment les frontaliers suisses.

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