Le devoir de conseil de l’assureur en présence d’une opération complexe

Un assuré qui souhaitait investir pour sa retraite, souscrit successivement, par l’intermédiaire d’un courtier, cinq contrats d’assurance de retraite complémentaire facultative, puis recherche la responsabilité du courtier et de l’assureur, leur reprochant de lui avoir fait souscrire une succession de contrats mobilisant sa force d’épargne sur plus de vingt ans, dans une mesure disproportionnée à ses capacités financières réelles, manquant ainsi à leur obligation d’information et de conseil.

L’arrêt de la Cour d’appel de Rouen est cassé par la permière chambre civile de la Cour de cassation au visa de l’article 1382 du Code civil au regard duquel la cour d’appel, selon la haute Cour, a privé sa décision de base légale en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si, indépendamment de l’information documentaire fournie sur le fonctionnement autonome de chacun de ces contrats, l’assuré avait reçu du courtier et de l’assureur une information adaptée à la complexité d’une opération reposant sur la souscription cumulée de cinq contrats d’assurance de retraite complémentaire, propre à l’alerter sur l’accroissement des risques liés à cette situation, notamment, quant à la perte des avantages fiscaux et l’érosion des placements réalisés pouvant résulter d’une mise en réduction simultanée de tout ou partie des contrats relevant du dispositif de la loi n° 94-126 du 11 février 1994, et si ce montage progressif répondait à la situation personnelle de l’intéressé, en regard de sa force d’épargne à long terme.

Cass. 1re civ., 4 juin 2014, n° 13-12770

Directive européenne du 15 mai 2014 – MIF II

La DIRECTIVE 2014/65/UE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL
du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE a été publiée au Journal Officiel de l’Union européenne du 12 juin 2014.

Responsabilité du prestataire de services d’investissement à l’égard d’investisseurs avertis

Des investisseurs souscrivent auprès d’un prestataire de services d’investissement une convention d’ouverture de compte joint leur permettant de passer des ordres à distance sur le service de règlement différé ainsi que de conclure des achats et ventes de titres dits « à découvert ».

Assignés en paiement de l’insuffisance de couverture, ils sollicitent des dommages-intérêts à concurrence de la différence entre le solde débiteur du compte et le montant des sommes réclamées

La Cour d’appel de Douai rejette leur demande aux motifs que les dispositions réglementaires relatives à la couverture des opérations sur le marché à terme et à la liquidation des positions du donneur d’ordre en cas d’insuffisance de celle-ci, étant édictées dans l’intérêt des intermédiaires et de la sécurité du marché, ne peuvent être invoquées par le donneur d’ordre averti.

L’arrêt est cassé par la chambre commerciale de la Cour de cassation au visa des articles L. 533 du Code monétaire et financier, dans sa rédaction alors applicable, et 1147 du Code civil.

Le prestataire de services d’investissement est tenu d’exercer son activité avec la compétence, le soin et la diligence qui s’imposent, ainsi que de se conformer à toutes les réglementations applicables à l’exercice de son activité afin de préserver au mieux les intérêts de son client et l’intégrité du marché et il résulte du premier de ces textes qu’il est tenu de réparer les conséquences dommageables de l’inexécution de ses obligations.

La cour d’appel retient encore que les investisseurs, opérateurs avertis, informés en permanence de la situation de leur compte et de la répartition de leur portefeuille par l’intermédiaire du site internet de la société, avaient eux-mêmes le pouvoir, du moment qu’ils n’étaient plus en mesure de couvrir leurs positions, de les liquider de leur propre chef, que c’est donc librement qu’ils ont décidé de reporter la liquidation de leurs engagements dans l’attente d’une conjoncture boursière plus favorable à leur exécution et que l’attentisme de la société d’investissement résulte de la volonté manifestée en pleine connaissance de cause par ses clients de miser sur une remontée des cours de la bourse, de sorte qu’ils ne justifient pas d’une relation de causalité entre le manquement reproché à la société et leur préjudice, lequel résulte de choix imposés à la société de bourse.

Sur ce moyen aussi, l’arrêt est cassé au visa des mêmes textes.

La Cour de cassation énonce que le prestataire de services d’investissement intervenant pour le compte d’un donneur d’ordre sur le marché à règlement différé est tenu, même sans ordre de liquidation et nonobstant tout ordre contraire de ce dernier, de liquider les positions de son client lorsque celui-ci n’a pas, le lendemain du dernier jour de la liquidation mensuelle, remis les titres ou les fonds nécessaires à la livraison des instruments financiers vendus ou au paiement des instruments financiers achetés, cette liquidation d’office devant également avoir lieu lorsque les positions du donneur d’ordre ont été reportées et que celui-ci n’a pas, avant la même date, réglé son solde débiteur et constitué ou complété la couverture afférente à l’opération de report.

La faute imputée aux investisseurs n’aurait pu être commise en l’absence de celle de la société.

Cass. com., 13 mai 2014, n° 09-13805

Obligations du prestataire de services d’investissement (PSI) – Assurance-vie

 

Par un arrêt du 11 septembre 2013, la Cour de cassation rappelle que le professionnel est tenu de se renseigner sur son client et de lui délivrer une information adaptée en matière d’assurance-vie.

 

Les faits étaient les suivants : un couple investit une forte somme, pour une durée de huit ans, dans un contrat d’assurance-vie. Lors de la souscription, des conditions générales valant note d’information leur ont été remises. Celles-ci précisaient que les souscripteurs pouvaient choisir le support de leur investissement. Le couple a opté pour un contrat « multisupports », faisant ainsi l’acquisition de parts, ou unités de compte, dont la valeur pouvait varier se-lon les mouvements des marchés financiers. Les investisseurs s’aperçoivent, trois ans après, qu’ils ont perdu en capital. Ils recherchent alors la responsabilité de la banque pour manquement à son devoir d’information et de mise en garde. Cette demande est accueillie par les premiers juges mais rejetée par la cour d’appel.

 

La Cour de cassation a jugé que « les motifs étaient impropres à établir que la banque avait procédé à l’évaluation de la situation financière des époux X (…) et de leurs objectifs en ce qui concernait l’adhésion au contrat litigieux, et qu’elle leur avait fourni une information adaptée en fonction de cette évaluation ». 

 

Cass. 1re civ., 11 sept. 2013, n° 12-18.864 : JurisData n° 2013-019111